En cas d'incapacité de travail, l'employeur est tenu au versement d'un salaire garanti. Deux exceptions existent…
Le salaire garanti n'est pas versé lorsque l'incapacité de travail est due à un accident survenu au cours d'une compétition ou exhibition sportive, ou lorsqu'elle trouve sa source dans une faute grave commise par le salarié.
En ce qui concerne le premier cas, trois conditions cumulatives doivent être remplies pour que l'employeur puisse refuser de payer le salaire garanti. Premièrement, l'accident doit être survenu au cours d'une compétition ou exhibition sportive. Deuxièmement, l'organisateur doit percevoir un droit d'entrée, quel qu'en soit le montant. Troisièmement, le salarié participant doit percevoir une rémunération sous quelque forme que ce soit. Une coupe, une médaille ou un remboursement de frais encourus ne constituent pas une rémunération. Par contre, une indemnité qui dépasse nettement un remboursement de frais constitue une rémunération.
L'employeur n'est pas non plus tenu de verser le salaire garanti lorsque l'incapacité de travail trouve sa source dans une faute grave commise par le salarié. Que faut-il entendre par "faute grave" ? La faute grave doit être examinée dans son contexte. Selon un jugement du tribunal du travail d'Anvers, il est question de "faute grave" lorsque l'acte commis ne s'appuie sur aucune motivation raisonnable et fait état d'un manque total de sens de responsabilités et d'une grande dose de légèreté. De façon plus générale, la jurisprudence définit la faute grave comme étant l'acte dont l'auteur connaissait ou aurait dû connaître le danger manifeste. Ainsi ont été reconnus comme fautes graves le fait de participer sous l'influence de la boisson à une bagarre de café, celui de chuter d'un mur après une soirée un peu trop arrosée ou encore celui de conduire un véhicule qui ne répond plus aux conditions élémentaires de sécurité. La Cour du travail de Bruxelles a eu à se prononcer sur le cas d'une tentative de suicide. L'employeur refusait de payer à une travailleuse les 30 premiers jours de salaire garanti pour le motif que son geste constituait une faute grave. La Cour du travail rejette l'argumentation de l'employeur. Elle décide que, à l'exception du cas d'école d'un acte suicidaire dans l'intention de nuire à l'employeur, la tentative de suicide est la conséquence d'un état maladif (mental, nerveux, pathologique ou psychologique), qui rend le travailleur insuffisamment maître de ses actes.
Intervention chirurgicale
Une opération de chirurgie à visée non curative ouvre-t-elle le droit au salaire garanti ? La Cour de cassation s'est prononcée dans un arrêt du 12 mars 1984. Un salarié se fait pratiquer une vasectomie en dehors de toute considération médicale (son épouse ne supporte pas les moyens contraceptifs classiques). L'employeur refuse de verser le salaire garanti. Le travailleur conteste. Selon la Cour de cassation, le travailleur a droit à sa rémunération lorsque son incapacité de travail résulte d'une intervention chirurgicale même s'il recourt à celle-ci pour une autre raison que le rétablissement ou la préservation de sa santé. La maladie peut résulter du traumatisme lié à l'opération même en dehors de toute incapacité préalable. Pour être dispensé de verser le salaire garanti, l'employeur doit prouver que le fait d'avoir demandé le traitement chirurgical constitue une faute grave. Si on définit la faute grave comme l'acte commis par le travailleur qui ne s'appuie sur aucune motivation raisonnable, et la santé comme l'état de bien-être psychique et physique, il y a fort à parier que le travailleur pourra dans la plupart des cas prétendre au salaire garanti.
Article de Paul Ciborgs